Les resilience bonds constituent une forme d’obligation catastrophe liant les primes d’assurance à des projets de résilience, ce qui permet de monétiser les pertes évitées via un mécanisme de crédits, nouvelle source de financement.

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Veolia, spécialiste en gestion du cycle de l’eau, des déchets et de l’énergie, envisage la gestion du risque climatique de trois façons : en minimisant son propre impact industriel, en gérant ce risque pour toutes les installations industrielles qu’on lui confie et en conseillant les collectivités territoriales dans ce domaine.

« Le dérèglement climatique n’est pas nouveau, mais aujourd’hui, il devient incontournable », annonce Oliver Wild, Group chief risk, insurance & internal control coordination de Veolia. Est-ce que les acteurs ont pris conscience de l’enjeu ? Une chose est sûre, le risque climatique est un élément de décision pour les collectivités territoriales. « Fort de notre expérience en gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie, nous sommes un partenaire actif sur ces sujets-là : nous travaillons de manière globale à la réduction de l’impact du traitement du plastique pour les océans et à la réduction des gaz à effet de serre, poursuit Oliver Wild. Au niveau micro-économique, nous gérons aussi les risques et les assurances des installations dont nous avons la charge. » Même en délégation, Veolia part du principe qu’il a la maîtrise des installations industrielles de traitement de l’eau, de recyclage et de production d’énergie que les villes et autres collectivités territoriales lui confient. « Non seulement nous évaluons le niveau des risques et proposons un plan de prévention et d’action en cas de sinistre, mais nous travaillons avec les villes pour réduire leur niveau d’exposition au risque », décrit Oliver Wild. Concrètement, Veolia propose ainsi aux villes et aux collectivités territoriales de penser le risque à différentes étapes : dans le cadre de l’exploitation de leur site, mais aussi – et surtout – en amont d’un nouveau projet.

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Veolia se fait alors conseil pour augmenter la résilience globale aux risques climatiques. « Notre but est de penser de manière globale l’échelle de toute une ville, pour choisir au mieux l’implantation de nouveaux bâtiments ou mettre en œuvre des dispositifs de protection », note Oliver Wild. Le but est de prendre de la hauteur et de ne pas traiter le risque uniquement à l’aune d’un site particulier. Par exemple, un industriel peut très bien protéger son site de production, mais cela ne suffira pas si ses salariés ne peuvent pas venir travailler ou si les routes pour distribuer la production sont coupées. La tempête Katrina à la Nouvelle-Orléans en a été la preuve, où tout l’acheminement par le fleuve Mississippi avait été coupé pendant des jours. Le groupe français accompagne donc des villes, comme la Nouvelle-Orléans, Copenhague ou encore Milwaukee, pour améliorer leur résilience à ce genre d’événements. Cette résilience devient alors à moyen terme un facteur d’attractivité pour le développement économique. Les industriels, par exemple, seront plus enclins à installer leurs usines dans une région capable de leur assurer la continuité de leur activité.

« Le seul frein à cette démarche reste le financement, nuance Johann Clere, Strategic partnerships director chez Veolia Environnement. Quand nous apportons des solutions de résilience en cas d’inondation, par exemple, le retour sur investissement n’est pas aussi clair que pour un investissement dans les énergies vertes où l’on peut vendre rapidement l’électricité produite. » Il est alors difficile de convaincre des collectivités ou des industriels d’investir des sommes conséquentes pour un événement qui, potentiellement, ne se produit qu’une fois tous les cinq ans. « Nous échangeons actuellement avec des acteurs de l’assurance qui imaginent une solution financière, des resilience bonds, inspirés des obligations catastrophes (CAT Bonds) », poursuit Johann Clere.

Comment cela marcherait-il ? Les obligations catastrophes sont un instrument imaginé par les sociétés d’assurances dans les années 90 visant à transférer des risques catastrophes avec pertes potentielles extrêmes vers des investisseurs privés. Il s’agirait d’un investissement risqué. Si tout va bien, les investisseurs récupèrent leur mise de départ, en plus d’une rémunération attractive. Mais si un événement climatique prédéfini survient, l’argent investi sert à surmonter la crise. « Le placement est risqué, mais il présente un avantage important : cet investissement n’est pas directement corrélé aux cycles économiques et apporte en ce sens une forme de diversification », conclut Johann Clere.

Johann CLERE Veolia

L’avantage de ces resilience bonds est aussi qu’ils pourront financer des solutions pour s’assurer que des zones industrielles, notamment dans la chimie, soient plus robustes et résilientes face à des à des événements climatiques forts ou assurer par exemple l’approvisionnement en électricité des hôpitaux. La ville américaine de Houston, après avoir vécu des inondations dévastatrices en 2017, explore actuellement la mise en œuvre d’un premier resilience bond de pas moins de 15 Md$ pour créer un système de digues et de vannes de gestion des flux d’inondation, inspiré des pratiques aux Pays-Bas. Prévenir plutôt que guérir, ce mantra devrait bien sûr plaire aux assureurs qui ont eux-mêmes une capacité à investir… et donc à soutenir ce nouveau type d’obligations.